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I


Vous êtes triste, vous souffrez, l’ennui vous dévore ; vous redoutez l’avenir, le présent vous accable. Dans le passé, aucun souvenir n’est assez doux ou assez attachant pour ranimer les froides heures qui s’écoulent. Et cependant, le temps marche, et, quand le soir arrive, vous êtes surprise, vous êtes effrayée de ce nombre de jours, de cette suite d’années qui se perdent dans un gouffre sans écho.

Vous peignez votre situation d’une manière touchante, et je suis pénétré de votre douleur, quoique je ne voie rien d’exceptionnellement malheureux dans votre situation matérielle ; mais le dégoût qu’elle vous inspire constitue un malheur véritable. Là où l’âme ne se sent pas bien, l’existence est réellement troublée.

Il n’est au pouvoir de personne de vous guérir de cette langueur maladive. Le mal a sa racine dans les plus secrets retranchements de votre conscience. Il faut que vous soyez à vous-même votre médecin, et que, par un régime hardi et généreux, vous rendiez à votre âme la santé qu’elle a perdue.

Les inconvénients de votre position, que vous exprimez avec candeur, seraient peu de chose si vous les envisagiez sous le jour de la vérité. Les pointes de mille traits frivoles s’émousseraient sur vous, si vous n’aviez pas, dans un moment de fatigue et d’inertie,