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de gages, et, quand elle en vint au caillou d’Alvimar, elle le lui jeta dans les jambes avec dédain.

Il en fut si outragé qu’il l’eût peut-être traitée comme il avait fait du louveteau, s’il eût eu encore l’arme dont il se servait si vite et si bien.

Mais il fit en vain le mouvement involontaire de la saisir, et Lauriane, qui le regardait, s’applaudit de l’avoir désarmé. Il rencontra ses yeux et se hâta de sourire ; puis il essaya de parler d’autre chose, et Bois-Doré demanda à Lucilio un air de musette pour dissiper le fâcheux effet de cette aventure, tandis que La Flèche, remportant son grand panier sur sa tête, ses instruments magiques sous son bras, et, tirant de l’autre main la petite sibylle encore toute frémissante, franchissait avec empressement la herse et le pont-levis du manoir.

— À présent, tu vas me donner à manger ? dit-elle quand ils furent en rase campagne.

— Non, tu as trop mal travaillé !

— J’ai faim.

— Tant mieux !

— J’ai faim, je ne peux plus marcher.

— En cage alors !

Il la remit dans son panier, malgré elle, et l’emporta en courant.

Les cris de l’infortunée créature se perdirent sans écho dans la plaine immense.

— Mario ! Mario ! pleurait sa voix entrecoupée ; je veux voir Mario ! Méchant ! assassin ! Tu m’avais promis de me faire voir Mario, qui me donnait à manger et qui jouait avec moi, et sa mère, qui m’empêchait d’être battue ! Mercédès ! Mario ! venez me chercher ! Tuez-le ! il me fait mal, il me secoue, il me tue, il me