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de la petite rivière, pour lui adresser nombre de questions sur le rang et la fortune de son hôte ; à quoi Bois-Doré ne pouvait rien répondre, sinon que M. d’Ars le lui avait recommandé comme un homme de qualité dont il faisait le plus grand cas.

— Guillaume est jeune, disait M. de Beuvre ; mais il sait trop ce qu’il nous doit pour nous avoir présenté un homme indigne de notre bon accueil. Je m’étonne pourtant qu’il ne vous ait rien dit de plus ; mais M. de Villareal a dû s’ouvrir à vous des motifs de sa venue. Comment se fait-il qu’il n’ait point suivi Guillaume aux fêtes de Bourges ?

Bois-Doré ne pouvait répondre à ces questions ; mais, dans sa pensée intime, de Beuvre se persuadait que ce mystère ne couvrait pas d’autre dessein que celui de plaire à sa fille.

— Il l’aura vue quelque part, se disait-il, sans qu’elle ait fait attention à lui ; et, bien qu’il me semble fort catholique, il me semble aussi fort épris d’elle.

Il se disait encore que, dans l’état des choses, un gendre espagnol catholique relèverait la fortune de sa maison, et réparerait le tort qu’il avait fait à sa fille en se jetant dans la Réforme.

Ne fût-ce que pour faire mentir les jésuites, qui l’avaient menacé, il eût souhaité que l’Espagnol fût d’assez bonne maison pour prétendre à la main de Lauriane, même quand il eût été médiocrement riche.

M. de Beuvre raisonnait en sceptique. Il ne faisait pas des Essais de Montaigne le même bruit que Bois-Doré faisait de l’Astrée, mais il s’en nourrissait assidûment, et c’était même le seul livre qu’il lût désormais.

Bois-Doré, plus honnête en politique que son voisin, n’eût pas raisonné comme lui, s’il eût été père. Il ne tenait