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suis décidé à sauver l’honneur de la famille, et vous ne pouvez pas vous y opposer.

— Je m’y oppose ; vous ne me devez pas ce sacrifice : nous ne portons pas le même nom.

— Nous sommes les fils de la même mère, et je ne veux pas qu’elle meure de honte et de chagrin en vous voyant insolvable.

— Pas plus que ma mère, je ne veux d’une telle honte. Je me marierai.

— Pour de l’argent ? Aux yeux de notre mère et aux miens tout autant qu’aux vôtres, mon frère, ce serait pire, vous le savez bien !

— Eh bien ! j’accepterai une place.

— Pire, toujours pire !

— Non, il n’y a rien de pire pour moi que la douleur de vous ruiner.

— Je ne serai pas ruiné.

— Enfin ne puis-je savoir le chiffre de mes dettes ?

— C’est inutile ; il me suffit que vous m’ayez donné votre parole de n’en avoir pas qui soient inconnues au notaire chargé de votre liquidation. Je vous ai demandé seulement de vouloir bien jeter les yeux sur quelques-uns de ces papiers pour en vérifier, s’il se peut, l’exactitude. Vous l’avez constatée ; il suffit, le reste ne vous regarde pas.

Le duc froissa les papiers avec colère, marcha à grands pas dans la chambre, sans pouvoir trouver un seul mot qui peignît la détresse de son esprit. Puis il alluma un cigare qu’il ne fuma pas, se jeta dans un