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dences peu convenables et qui l’avaient étonnée de la part d’un homme si bien élevé, elle avait mis le petit cheval au pas, ne se fiant pas trop aux branches qu’elle pouvait rencontrer dans l’obscurité, et se sentant plus portée à rêver qu’à courir. Une grande anxiété pesait sur son esprit. L’attitude du marquis avec elle était inexplicable, presque offensante. Elle en cherchait la cause jusque dans les plus secrets replis de sa conscience, et, n’y trouvant rien à reprendre, elle se reprocha d’y tant songer. Il était peut-être sujet à quelques bizarreries, comme les gens absorbés par un grand travail, et quand après tout elle lui serait devenue antipathique, n’allait-il pas se marier, et la joie de la marquise ne serait-elle pas assez complète pour que la pauvre demoiselle de compagnie pût sans ingratitude se retirer ?

Comme elle songeait à son avenir, se promettant d’en parler à madame d’Arglade, qui l’aiderait peut-être à trouver un autre emploi, elle sentit arrêter brusquement son cheval et vit auprès d’elle un homme dont le mouvement l’effraya.

— Est-ce vous, André ? dit-elle en sentant que son cheval semblait céder à une main connue. Et comme on ne répondait pas et qu’elle ne distinguait aucun costume particulier : — Est-ce vous, monsieur le duc ? ajouta-t-elle avec inquiétude. Pourquoi m’arrêtez-vous ?

Elle ne reçut pas de réponse ; l’homme avait disparu, le cheval était libre. Elle eut peur, une peur