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la ville noire.

çant à s’en guérir par une réaction de sa volonté, il reprenait son bâton de voyage en se disant : Laissons courir le temps ; mon mal passera plus tard, et peut-être sans que je m’en occupe.

Un jour, à une lettre de reproches de Gaucher, il répondit en avouant tout ce qu’il avait souffert, tout ce qu’il avait senti, tout ce qu’il avait modifié et corrigé dans son âme. Il ne nomma pas Tonine, mais son secret était facile à deviner. Sa lettre était digne, sincère et affectueuse. Il la finissait en disant : « Il faut que tu me pardonnes, mon brave camarade, d’avoir tant tardé à t’ouvrir mon cœur. J’attendais toujours le calme, qui n’est pas encore bien venu, mais qui n’est plus aussi absent que par le passé. J’ai des jours où je suis presque content d’avoir été chercher au loin l’instruction que je ne pouvais pas deviner à moi tout seul. Une chose me rendrait peut-être tout à fait tranquille, ce serait de savoir si la personne à laquelle j’ai trop pensé est heureuse dans son mariage comme elle le mérite. Si je ne t’ai point fait jusqu’ici de questions sur elle, et si je ne t’en fais pas encore, ce n’est pas que je