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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

La pensée est donc bien supérieure au sentiment puisqu’elle le possède et n’en est pas possédée ? C’est beau ! mais je me console d’être à distance ; car, de la sphère où je suis, je contemple votre étoile et j’en rêve des merveilles sans y apercevoir aucune tache. Vous qui, avec la lunette, y entrez comme chez vous, vous y voyez peut-être des ravins, des précipices et des volcans qui vous la gâtent quelquefois ou du moins qui vous y rendent le trajet difficile. C’est comme pour la musique : je crois y trouver des jouissances infinies, que le travail de la science émousserait beaucoup, si j’étais musicienne.

Adieu, bon major ; je vous récrirai à propos de tout cela ; car j’ai encore beaucoup à vous dire de moi ; et, puisque vous êtes si bienveillant, je ne finirai pas Lélia[1] sans vous demander beaucoup de choses. Je ne sais pas si mon écriture est lisible, même pour un homme habitué au sanscrit.

Adieu et merci mille fois. Vous seriez bien aimable de me donner de vos nouvelles ici, rue Grange-Batelière, 7. J’y serai encore une quinzaine et il est possible, probable même, que nous allions passer l’été en Suisse. La santé de mon fils est meilleure ; mais les médecins lui ordonnent un climat frais en été et chaud en hiver. Nous serons donc bientôt à Genève et ensuite à Naples. Dites-moi dans quelle partie, bien

  1. Il s’agit de la nouvelle édition de Lélia, augmentée d’un volume publié en 1839.