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consuelo.

agréablement à ceux qui ont des oreilles pour l’entendre. À eux deux ils ont baptisé ce puits la source des pleurs. Cela peut être fort poétique, et il ne tient qu’à ceux qui aiment les fables païennes de s’en contenter.

— Je ne m’en contenterai pas, pensa Consuelo, et je saurai comment ces pleurs se tarissent.

— Quant à moi, poursuivit le chapelain, j’ai bien pensé qu’il y avait une perte d’eau dans un autre coin de la citerne…

— Il me semble que sans cela, reprit Consuelo, la citerne, étant le produit d’une source, aurait toujours débordé.

— Sans doute, sans doute, reprit le chapelain, ne voulant pas avoir l’air de s’aviser de cela pour la première fois ; il ne faut pas venir de bien loin pour découvrir une chose aussi simple ! Mais il faut bien qu’il y ait un dérangement notoire dans les canaux naturels de l’eau, puisqu’elle ne garde plus le nivellement régulier qu’elle avait naguère.

— Sont-ce des canaux naturels, ou des aqueducs faits de main d’homme ? demanda l’opiniâtre Consuelo : voilà ce qu’il importerait de savoir.

— Voilà ce dont personne ne peut s’assurer, répondit le chapelain, puisque le comte Albert ne veut point qu’on touche à sa chère fontaine, et a défendu positivement qu’on essayât de la nettoyer.

— J’en étais sûre ! dit Consuelo en s’éloignant ; et je pense qu’on fera bien de respecter sa volonté, car Dieu sait quel malheur pourrait lui arriver, si on se mêlait de contrarier sa sirène ! »

« Il devient à peu près certain pour moi, se dit le chapelain en quittant Consuelo, que cette jeune personne n’a pas l’esprit moins dérangé que monsieur le comte. La folie serait-elle contagieuse ? Ou bien maître Porpora