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avait une droiture invincible, une moralité douce dans la forme, absolue et quelque peu farouche dans le fond. Elle était bienveillante à l’excès par ignorance du mal auquel il lui était horriblement difficile de croire ; mais quand elle l’avait constaté, elle ne pouvait transiger, et Raoul tremblait de se confesser à elle bien plus que de se confesser à Constance. Il ne comptait pas s’excuser vis-à-vis de celle-ci, mais il comptait sur les flammes de son amour pour la consoler. Cécile Verrier n’était accessible à aucune éloquence et n’admettait aucune défaite. Elle força Raoul dans ses derniers retranchements, et, ne pouvant l’amener à ce qu’elle conseillait, elle se leva épouvantée en s’écriant :

— Ah ! malheureux, tu es coupable, tu l’as trompée !

Elle ne voulut rien écouter, et fut de glace avec lui pendant le reste de la journée. Constance feignit de ne pas s’en apercevoir ; mais elle devina bien ce qui s’était passé, et Raoul vit qu’elle le devinait. Tout cela était d’une singulière amertume pour lui. Après dix années d’amour et d’espérance, il arrivait à la réalisation du rêve de sa vie, et le bonheur fuyait consterné devant une tache qu’il n’était pas possible de faire disparaître.

Cécile le vit si triste qu’elle s’adoucit, et, revenant à son idée :

— Voyons, voyons, dit-elle, il faut en finir ! J’ai pensé à tout cela. Je n’ai pas dormi de la nuit. J’ai prié l’âme de mon frère, et elle m’a parlé. Il faut sauver Constance qui dépérit ; tout est là. Il faut la trom-