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cours de dévotion. Elle n’était aimée de personne, et ses meuniers, qu’elle traitait de Turc à More, prétendaient qu’elle embrouillait les chiffres et gardait bonne part des pieuses collectes dont elle se faisait dépositaire, pour relever son commerce et amasser une dot à sa fille.

Cette fille, droite comme un pieu et sèche comme une coquille, allait quelquefois seule faire des quêtes à domicile. On disait qu’elle était surtout en quête d’un mari. Je ne sais qui de la fille ou de la mère me paraissait la plus haïssable, la plus aigre, la plus mielleuse et la plus hypocrite. Elles avaient pris la dévotion comme un moyen de parvenir en pénétrant dans les familles, en se faisant protéger par le haut clergé et en s’imposant comme de saintes et respectables personnes aux vieilles maisons nobles du pays. Ma grand’mère en avait été longtemps dupe, et Denise aimait à faire des cancans avec elles sur M. Costel et sur les autres incrédules des environs ; mais ma grand’mère, dont le bon sens augmentait avec l’âge, faisait peu de cas de ces dames et imposait silence à ma nourrice.