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ne vous faut pas, avec les bonnes grandes jambes que vous avez, plus d’une demi-heure pour venir de chez vous ici. Venez tous les jours passer avec nous six heures, les repas compris. Vous aurez la matinée et la soirée à passer avec votre cher oncle, et vous me laisserez rétribuer votre temps et vos peines du mieux qu’il me sera possible. Je sais qu’avec vous, s’il y a des difficultés, ce sera pour vous faire accepter ce qui vous est dû ; mais vous allez me promettre d’en passer par où je voudrai.

Frumence refusa d’être payé, prétendant que deux repas par jour, c’était bien assez de dépense pour ma grand’mère. Et puis cela lui semblait aussi étrange de vendre la science à des personnes aimées, qu’à son oncle de vendre les sacrements à des personnes croyantes.

— Si vous n’acceptez pas un traitement, reprit ma grand’mère, je ne puis accepter votre dérangement et vos fatigues.

Frumence hésitait. Il n’osait pas refuser d’être utile à ma grand’mère, qu’il aimait et respectait réellement ; mais il était aisé de voir que l’idée de se déranger tous les jours et d’éduquer un personnage aussi inculte que mon cousin était pour lui un sacrifice et une contrariété auxquels il préférait de beaucoup sa misère, son pain noir et ses habits râpés.