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rais craint de faire un sacrilège en touchant à ces papiers qu’elle confiait à mon respect.




XL


Deux mois s’étaient écoulés, et je commençais à me croire oubliée ou épargnée. Je vivais avec Jennie dans un isolement mélancolique. Je m’étais interdit de sortir. Il me semblait que mon deuil ne devait pas voir sitôt le soleil, même pour traverser et visiter la solitude. Un sentiment de réserve instinctive nous retenait, Jennie et moi, dans cette maison silencieuse et fermée où nous nous efforcions de croire que quelque chose de la chère existence disparue avait encore besoin de nous. Nous ne faisions pas de projets : nous sentions que nous n’avions pas encore le droit d’en faire. Quand même mon avenir eût été assuré, nous nous fussions reproché de ne pas vivre le plus longtemps possible avec le passé regretté.

Un jour pourtant, Jennie se tourmenta pour ma santé, qui souffrait un peu de cette claustration, j’avais, malgré ma petite taille, beaucoup de forces à dépenser, et je n’avais jamais été bien portante