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Mais j’étais un obstacle à ce brillant avenir, et je devais aider ma sensible compagne au lieu de la contrecarrer. Ici, je perdis patience et lui demandai sèchement ce qu’elle entendait par là.

— Ma chère petite, répondit-elle, tu n’as que faire de t’en cacher. J’ai fort bien vu que, toi aussi, tu es amoureuse de M. Frumence. D’ailleurs, on le dit dans le pays. Tu as plus d’esprit et d’instruction que moi, et tu es très-coquette, parce que tu n’as pas beaucoup de religion. Eh bien, il faut oublier M. Frumence. Tu es noble, tu ne peux pas l’épouser. Il faut lui parler de moi adroitement, comme tu sais parler quand tu veux. Il faut lui faire comprendre qu’il n’a pas besoin d’être si fier et si craintif vis-à-vis de moi, car je suis décidée pour lui, et, si maman veut me remettre au couvent, je me ferai enlever par lui. Alors, il faudra bien qu’on nous marie. Il n’y a aucun mal dans tout cela. Le mariage purifie tout, et mon confesseur m’a dit que les péchés où l’on ne met pas de mauvaise intention n’étaient pas mortels.

Elle me débita cent sottises du même genre sans me donner le temps de lui répondre, et, quand elle eut parlé avec beaucoup d’exaltation, elle s’enfuit dans sa chambre en me criant que je devais réfléchir et demander à Dieu une bonne inspiration.