Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/17

Cette page n’a pas encore été corrigée

térieuse aventure. Elle l’apprit et en mourut. Le marquis devint sombre, irritable, injuste, et jura que son ingrate et fatale patrie n’aurait pas ses os. Il se refusa aux instances de madame de Valangis, qui le suppliait de faire des démarches pour rentrer en France. Il prétendait n’aimer plus rien ni personne. Il ne pouvait pardonner à sa mère de n’avoir pas su veiller sur son unique enfant. Seule, la vieille madame de Valangis résista aux coups terribles qui avaient frappé sa maison. Elle devint très-dévote et fit des offrandes et des vœux à toutes les chapelles du pays, espérant toujours qu’un miracle lui rendrait sa pauvre chère enfant.

Quatre ans s’étaient écoulés. On était en 1809, Madame de Valangis avait soixante et dix ans. Un matin, elle vit arriver une femme pâle qui sortait de l’hospice. C’était Denise la nourrice, guérie de l’aliénation mentale, mais vieillie avant l’âge, et si exténuée par le traitement, qu’on la reconnaissait à peine.

— Madame, dit-elle, saint Denis, mon patron, m’est apparu trois fois en rêve. Trois fois il m’a commandé de venir à vous pour vous dire que mademoiselle Lucienne va revenir, et me voilà. Les médecins ont déclaré depuis longtemps que je n’étais plus malade. Seulement, ces messieurs, qui ne croient à rien, disent que j’aurai toujours