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vous aurez un jour, ce n’est pas à vous, c’est à votre grand’mère d’y penser d’avance.

— Tu as raison, Jennie, répondis-je, et je ne suis pas du tout inquiète de moi : mais, si, avec cette idée-là, Marius pouvait devenir raisonnable et bon, ce serait bien de la lui laisser.

— Non, reprit Jennie, c’est très-inutile. Marius deviendra raisonnable et bon de lui-même. Vous savez bien qu’il est doux, honnête, et qu’il est honteux quand il a fait une sottise. Il ne faut pas encore le prendre au sérieux. M. Marius n’est pas encore un jeune homme : c’est un écolier qui parle du monde sans savoir mieux que vous et moi ce que c’est. Il a de la fierté, c’est très-bon, et il a refusé votre argent, c’est très-bien. Il a peur cependant de manger de la vache enragée, le pauvre petit ! Eh bien, attendez comment il va se conduire. S’il montre du courage et de la patience, j’irai trouver M. de Malaval, je lui remettrai votre argent, et, sans le savoir, votre cousin sera mieux nourri et mieux logé. Je demanderai qu’on ait des égards pour lui, et il croira qu’il ne les doit qu’à sa bonne conduite : ça l’engagera à continuer. Jennie exerçait sur moi un doux magnétisme. Sa parole me calmait toujours. Je m’endormis tranquille. Elle-même chassa de son esprit tout germe d’inquiétude. Frappée par les plus grands mal-