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étrennes et cadeaux d’anniversaire que me donnait ma bonne maman. J’étais l’enfant le moins porté à compter et à calculer. Je ne doutai pas de ce que Jennie me disait, et je lui demandai en tremblant si j’avais bien cent francs. C’était à mes yeux un chiffre énorme pour les menus plaisirs d’un jeune homme ; mais je ne pensais pas pouvoir offrir moins à Marius, qui avait tant de besoins.

— Vous avez plus de cent francs, me répondit Jennie ; mais donnez peu à la fois, afin de faire plaisir plus souvent.

Je n’y pus tenir. Dès que j’eus les cent francs et que Marius revint nous voir, je les lui offris avec une joie enfantine. Il me rit au nez en me demandant où j’avais pris cela. Il savait bien, lui qui comptait toujours, que je n’avais rien du tout.

— Voyons, me dit-il après avoir repoussé l’argent avec dépit et en voyant que je pleurais, comment es-tu assez sotte pour te figurer que je suis d’humeur à recevoir l’aumône ?

— Pourquoi appeler ça l’aumône ? C’est un cadeau que je te fais. Tu peux bien recevoir de moi un cadeau, j’espère ?

— Non, ma pauvre Lucienne, je ne peux pas.

— Pourquoi ?

— Pourquoi ! pourquoi ! parce que c’est l’argent de Jennie !