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épître aux femmes.

De l’étude et des arts la douce volupté
Deviendroit un larcin à la maternité. »
Ô nature, ô devoir, que c’est mal vous connoître !
L’ingrat est-il aveugle, ou bien feint-il de l’être ?
Feint-il de ne pas voir qu’en ces premiers instants
Où le ciel à nos vœux accorde des enfants,
Tout entières aux soins que leur âge réclame,
Tout ce qui n’est pas eux ne peut rien sur notre ame ?
Feint-il de ne pas voir que de nouveaux besoins
Nous imposent bientôt de plus glorieux soins,
Et que pour diriger une enfance timide
Il faut être à-la-fois son modele et son guide ?
Oublieront-ils toujours, ces vains déclamateurs,
Qu’en éclairant nos yeux nous éclairons les leurs ?
Eh ! quel maître jamais vaut une mere instruite !
Sera-ce un pédagogue enflé de son mérite,
Un mercenaire avide, un triste précepteur ?
Ils auront ses talents, mais auront-ils son cœur ?
Disons tout. En criant, Femmes, vous êtes meres !
Cruels ! vous oubliez que les hommes sont peres ;
Que les charges, les soins, sont partagés entre eux,
Que le fils qui vous naît appartient à tous deux ;
Et qu’après les moments de sa première enfance
Vous devez, plus que nous, soigner son existence ?
Ah ! S’il étoit possible (et le fût-il jamais ?)
Qu’une mere un instant suspendît ses bienfaits,
Un cri de son enfant, dans son ame attendrie
Réveilleroit bientôt la nature assoupie.