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POÉSIES


VII

HÉROÏDE


À UNE CHASSERESSE ENCORE.


Ô pereant sylvæ !…
Tibulle, liv. IV, élég. iii.


Chez Tibulle, autrefois, Sulpicie à Cérinthe
Criait : « Quitte tes bois, reviens, ô Bien-Aimé ;
« Quelle fureur te tient et quel zèle allumé ?
« Gravir des monts, des rocs, et sur leur cime étreinte
« Pousser au sanglier en tes pieux enfermé !
« Imprudent ! et sans moi !… ton plaisir fait ma crainte. »

Et Phèdre, un peu moins haut, disait également
(Oh ! qu’elle eût voulu dire aussi : Farouche Amant),
Elle disait : « Cruel, descends aux doux ombrages,
« Aux ombrages d’en bas, faciles, sans outrages
« Pour tes membres légers, tout sanglants des buissons,
« Au sommeil de midi, plaisance des gazons,
« Quand la Beauté confuse, à petit bruit venue,
« Entr’ouvre les rameaux, penche une épaule nue,
« Et, mêlée au zéphyr, ose à peine poser,
« À ce beau front qui dort, une haleine, un baiser ! »

Et moi je viens à vous, ô belle Chasseresse,
À vous qui l’oubliez rappeler la tendresse.

Les monts vous ont reprise, et, perdue en vos bois,
Vous ne m’écrivez plus que sauvages exploits,