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à Mme de Lévi que ce choix rendoit son bonheur complet.

Mme la duchesse d’Orléans ne s’offrit point de mener Mme de Saint-Simon chez le roi ; nous en fûmes surpris. Elle y alla avec la duchesse de Lauzun comme le conseil venoit de lever. Le roi les reçut dans son cabinet. Il ne se put rien ajouter à tout ce que le roi dit à Mme de Saint-Simon sur son mérite, sa vertu, la singularité sans exemple d’un tel choix à son âge. Il parla ensuite de sa naissance, de sa dignité, en un mot, de tout ce qui peut flatter. Il lui témoigna une confiance entière, trouva la jeune princesse bien heureuse de tomber en de telles mains si elle en savoit profiter, prolongea la conversation un bon quart d’heure, parlant presque toujours ; Mme de Saint-Simon peu, modestement, et avec non moins d’attention que j’en avois eue à faire sentir par ses expressions pleines de respect, qu’elle ne se tenoit honorée et ne faisoit rouler ses remercîments que sur la confiance. Mgr le duc de Bourgogne, qu’elle vit chez lui, la combla de toutes les sortes ; et M. le duc de Berry ne sut assez lui témoigner sa joie. Le soir elle fut chez Mme de Maintenon, toujours avec Mme sa soeur. Comme elle commençoit à lui parler, elle l’interrompit par tout ce qui se pouvoit dire de plus poli et de plus plein de louanges sur un choix de son âge, et finit par l’assurer que c’étoit au roi et à la future duchesse de Berry qu’il falloit faire des compliments sur une dame d’honneur dont la naissance et la dignité honoroient si fort cette place. La visite fut courte, mais plus pleine qu’il ne se peut dire. Je fus fort surpris de ce que Mme de Maintenon sentoit et s’expliquoit si nettement sur l’honneur que Mme de Saint-Simon faisoit à son emploi. Nous le fûmes bien plus encore de ce que dans la suite elle le répéta souvent, et en termes les plus forts, en présence et en absence de Mme de Saint-Simon, et à plus d’une reprise à Mme la duchesse de Berry même, tant il est vrai qu’il est des vérités qui, à travers leur