Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/319

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pour ne pas perdre aussi le mérite qu’il s’étoit acquis auprès de moi, d’autant plus grand que je ne pouvois le deviner, et que, sans ce bon office, nous nous trouvions perdus de nouveau sans savoir pourquoi, et sûrement sans retour. On peut juger de la rage de la cabale de manquer un coup si à plomb pour toujours et si continuellement certain. Nous eûmes bien quelque vent, avant la déclaration de la place, mais fort superficiellement, de ces manéges. Le curé de Saint-Germain, peu curieux de pénitentes considérables, mais attaché d’estime à Mme de Saint-Simon, tâcha de lui persuader de le quitter, par la considération des effets pour toute la vie, et sans ressource, de ce genre de soupçon ; mais aucune n’entra là-dessus dans son esprit ni dans le mien, persuadés l’un et l’autre de la liberté et de la simplicité avec lesquelles on doit se conduire en choses spirituelles, qui ne doivent jamais tenir aux temporelles, beaucoup moins en dépendre. Depuis sa nomination on lui fit des attaques indirectes pour changer de confesseur, qui ne durèrent guère, parce qu’elle en fît doucement mais fermement sentir l’inutilité. Elle n’en a jamais eu d’autre tant que ce sage et saint prêtre a vécu, près de quarante ans depuis. Tel est l’usage des partis de religion quand les princes s’en mêlent.

Notre parti enfin amèrement pris, après tout ce que j’ai raconté, de céder à la violence, nous commençâmes à penser à éviter une dame d’atours avec qui il auroit fallu compter. Mme de Caylus étoit, à cause de sa santé, la seule de cette sorte. Elle avoit précisément toutes les raisons contraires à celles qui déterminoient au choix de Mme de Saint-Simon ; de tout temps liée avec Mme la Duchesse, et, dans les derniers, autant que les défenses de sa tante lui en pouvoient laisser de liberté ; insinuée par cette princesse et par Harcourt, son cousin, assez avant auprès de Monseigneur pour s’en faire une ressource pour l’avenir, et un appui même pour le présent s’il arrivoit, faute de sa tante. Cela étoit bien éloigné de ce que, pour abréger, je dirai toute