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sous le poids des années, des maux et des chagrins, il voit toujours, courbé par la main du malheur, arriver à pas lens la fin de sa carrière, sans que l’astre des cieux se soit un seul instant levé pur et serein sur sa tête affaissée, il n’y a rien-là que de très-simple, rien que de très-naturel, il n’y a rien qui ne remplisse l’ordre et la loi de cette mère commune qui nous gouverne tous, et tu n’as trouvé cet homme malheureux que par la comparaison que tu en as faites avec toi ; mais foncièrement il ne l’est pas : s’il t’a dit qu’il se croyait tel, c’était de même à cause de la comparaison qu’il établissait à l’instant, de lui à toi : qu’il se retrouve avec ses égaux, tu ne l’entendras plus se plaindre. Sous le régime féodal, traité comme la bête féroce, assoupli et battu comme elle, vendu comme le sol qu’il foulait aux pieds, n’était-il pas bien autrement à plaindre ; loin de prendre pitié de ses maux, loin d’adoucir ses malheurs, et de t’en composer ridiculement une peine, ne vois dans lui qu’un être que la nature t’offre pour en jouir à ton gré, et bien loin de sécher ses larmes, redoubles en la source, si cela t’amuse ; voilà les êtres que la main