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profondes considérations établissent de grandes différences dans le traitement. Pars, Justine ; mais ta compagne va être immolée… Adieu ; tâche de devenir plus heureuse que tu ne me parais l’avoir été jusqu’à ce moment-ci, et souviens-toi que tu auras toujours des amis dans Cœur-de-Fer et dans sa troupe.

Eh bien ! dit Justine en s’éloignant, voilà-t-il encore un caprice du ciel bien inexplicable ? Je veux sauver un enfant de la rage d’un monstre ; ce scélérat m’enferme et veut me violer ; je livre une de mes compagnes à la fureur d’un autre antropophage… Cette détestable action… cette trahison abhorrée… qui me couvrira de remords toute la vie, me vaut la liberté… de l’argent, et la fin de mes craintes… Justice divine, manifeste-toi donc à mes yeux d’une manière moins incompréhensible, ou je vais tomber dans des doutes qui t’outrageront peut-être ; et la malheureuse s’éloigne. Le jour luit, elle se reconnaît, elle voit le funeste étang, et près de là l’hospice où elle devait aller reposer trois mois auparavant ; elle s’y arrête ; elle y déjeûne, et reprend la route d’Auxerre, dont elle repart le 7 août, toujours dans la ferme résolution de gagner le Dauphiné, où son