Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/331

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

erreurs où nos égaremens venaient de les plonger. J’eus, comme vous l’imaginez bien, l’air d’approuver et de me charger de tout.

Je vis alors que pour en venir à mon but, je devais encore changer mes moyens : je m’emparai de l’esprit de Sulpice ; je lui représentai toute l’horreur du crime de son père. Un pareil monstre, lui dis-je, est capable de tout : ô mon ami ! poursuivis-je avec chaleur, tes jours même ne sont pas en sûreté ; je sais que dans ce moment-ci, seulement occupé d’anéantir les traces de son crime, il a fait enfermer Victoire… qu’il complotte contre ta propre liberté, et que pour mieux tout étouffer encore, quand il te tiendra dans quatre murs, il t’empoisonnera, ainsi que ta sœur… Fuyons, Sulpice, prévenons les nouveaux forfaits de cet homme féroce ; mais qu’il tombe avant sous nos coups : si son action était découverte, il serait proscrit par les loix ; leur glaive s’appesantirait sur lui ; soyons aussi justes qu’elles ; délivrons la terre de cet infâme coquin ; personne ne le sert que toi ; devenu farouche et sauvage, tout autre soin que les tiens lui deviennent suspects ; il croit voire le poignard de la vengeance dans les mains de tous ceux qui l’approchent ; saisis toi-même