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extrême. Préviens cette sévérité, dis-je à Sophie ; hâtes-toi, tu es enfermée, si tu ne la devances ; débarrasses-toi de ce monstre ; oses attenter aux jours de cet incommode argus, je t’en fournirai les moyens. Sophie, troublée, hésite, et finit par céder. Je prépare la fatale boisson ; ma sœur la fait prendre à sa mère, elle expire. Oh ! juste ciel, m’écriai-je alors en accourant avec le plus grand bruit… ma mère, que vous arrive-t-il ?… C’est Sophie… c’est ce monstre que votre juste indignation menaça, et qui se venge de vos équitables rigueurs, je veux qu’elle porte la peine de son crime… il m’est connu, il m’est dévoilé. Qu’on arrête Sophie ; qu’on s’assure de ce lâche instrument d’un parricide affreux ; il faut qu’elle périsse, il faut du sang aux mânes de ma mère. Et, en disant cela, je dépose, aux mains d’un commissaire accouru, le poison trouvé dans la chambre de ma sœur, et enveloppé dans son propre linge. Peut-il y avoir du doute maintenant, monsieur, continué-je en m’adressant à l’homme de justice ? le crime n’est-il pas avéré ? Il est affreux pour moi de dénoncer ma sœur ; mais je préfère sa mort à son déshonneur, et ne balance point entre la cessation de son existence et les suites