Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 2, 1797.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

science de la trahison, ainsi que dans celle de la calomnie, dont il est nécessaire de ne point s’écarter, si l’on veut recueillir en paix leurs fruits délicieux ; trahir ou calomnier un homme, par exemple, pour en servir un autre, ne doit rien apporter de plus à la félicité du méchant ; et s’il fait un heureux en immolant une victime, il se retrouve le soir absolument dans le même état que s’il n’eut point agi du tout, et n’a, d’après cela, nullement servi sa méchanceté ; il faut donc que ses coups, dirigés avec une arme tranchante des deux côtés, portent également sur plusieurs individus sans jamais en favoriser aucun, et voilà les écueils de ces deux sciences, en voilà les difficultés et les principes dont en les pratiquant l’une et l’autre, je ne me suis écarté de la vie. Mais, dit Justine, comment avec de telles maximes ne vous dévorez-vous pas entre vous ? — Parce que la solidité de notre association devient utile à sa conservation, et que, pour son maintien, nous préférons quelques sacrifices dont tous les moyens que nous avons ici de faire le mal, savent nous dédommager amplement. Ne t’imagines pas que nous nous chérissions beaucoup pour cela ; nous nous voyons tous les jours de trop près