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droit de vie et de mort qu’ils se sont arrogés sur nous. S’ils veulent le mettre individuellement en action, c’est alors sur leurs filles de garde qu’ils l’exercent ; celles-là, sans doute, peuvent être sacrifiées à tout moment du jour et de la nuit ; leur malheureux destin ne dépend absolument que du caprice de ces monstres, et pour la faute la plus légère il arrive souvent qu’elles sont aussi-tôt immolées par ces barbares. Cependant cet affreux goût du meurtre vient les embrâser aussi quelquefois dans les secrètes orgies qui se célèbrent chez la directrice. Ils consignent alors vingt-cinq louis pour le sujet proscrit, et ils l’exécutent. Cette masse est destinée aux remplacemens, et dès qu’ils y contribuent de cette façon, ils acquièrent le droit de tout faire.

Perpétuellement sous le glaive, dit Justine, il n’est donc aucun instant où nos jours ne soient menacés ? — Oh ! pas un seul ; il n’est aucune de nous qui, en se levant le matin, puisse répondre de coucher dans son lit le soir. — Quel sort ! — Il est affreux, sans doute ; mais on devient courageuse avec la perpétuelle obligation de s’alarmer ; et malgré la faulx de la mort, journellement suspendue sur nos têtes, tu n’en verras pas moins la gaîté, l’in-