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mêle toujours, et leur nombre varie perpétuellement ; mais il est bien rarement au-dessous de douze, et beaucoup plus souvent au-dessus. Sur cela, il y a toujours six servantes, dont l’emploi, comme tu l’as vu, est de servir toutes nues les moines à table. Le nombre des gitons invités est toujours en raison de celui des filles, un pour deux femmes, et cela, par la raison qu’ayant plus de peine à se les procurer comme il les leur faut ; ils les ménagent un peu plus. D’ailleurs ils les aiment mieux, et c’est par rafinement qu’ils en usent moins. Le régime de leur sérail est pourtant tout aussi sévère que celui du nôtre ; ils leur font subir les mêmes genres de punition ; le tableau de leur faute est égal ; et quand ils veulent une victime, ils la prennent là comme chez nous.

Il est inutile de te dire que jamais personne ne nous visite ; aucun étranger, sous quelque prétexte que ce puisse être, n’est introduit dans ce pavillon. Si nous tombons malades, le seul frère chirurgien nous soigne ; et si nous mourons, c’est sans aucun secours religieux ; on nous jette dans des trous pratiqués entre les intervalles des haies ; et par une insigne cruauté, si la maladie devient trop grave,