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chose que nous comprenons encore moins. Est-ce donc expliquer la nature que d’en attribuer les phénomènes à des agens inconnus, à des puissances invisibles, à des causes immatérielles ? l’esprit humain est-il bien satisfait, quand on lui dit de se rendre raison de ce qu’il n’entend pas, par l’idée plus incompréhensible encore d’un Dieu qui n’exista jamais ? la nature divine, à laquelle on ne conçoit rien, et qui répugne au bon sens et à la raison, peut-elle faire concevoir la nature de l’homme, que l’on trouve déjà si difficile à expliquer ? Demandez à un chrétien, c’est-à-dire à un imbécille, parce qu’il n’appartient qu’à un imbécille d’être chrétien ; demandez-lui, dis-je, quelle est l’origine du monde, il vous répondra que c’est Dieu qui a créé l’univers ; demandez-lui maintenant ce que c’est que Dieu, il n’en sait rien ; ce que c’est que créer, il n’en a nulle idée ; quelle est la cause des pestes, des famines, des guerres, des sécheresses, des inondations, des tremblemens de terre, il vous dira que c’est la colère de Dieu ; demandez-lui quels remèdes il faut employer à tant de maux, il vous dira des prières, des sacrifices, des processions, des offrandes, des cérémonies ;