Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 10, 1797.djvu/60

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je quittai Paris dès la nuit même. J’y revins l’année d’ensuite sous un autre nom et dans un autre quartier, sans être chicanée par personne ; mes affaires n’ont pas été mal depuis. On a bien raison de dire, que la corde de pendu porte bonheur. J’ai soixante mille livres de rente, et mes fonds croissent chaque année : tous les ans je fais un voyage en Italie ; j’y fais préparer les poisons que je distribue ensuite dans toute l’Europe. J’aime mieux cela que de les composer chez moi. En vérité, la mode de ces meurtres est telle aujourd’hui, que je puis à peine y suffire. Ce sera chez Christine où vous verrez des effets bien piquans des venins que je compose. — Tu lui en vends ? — Ah, bon Dieu ! pour cent mille écus tous les ans. — Elle est donc cruelle ? — C’est une Zingha. — Ah ! je l’adore d’avance, dit Clairwil ; allons Durand, partons quand tu voudras. Femme charmante, dis-je ici, voulant absolument satisfaire ma curiosité, j’exige enfin de toi de nous dévoiler à présent, quels étaient les personnages singuliers par qui tu nous fis battre, flageller, qui firent, en un mot, devant nous tant de choses extraordinaires chez toi… L’un, nous dit la Durand, est le