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quoi donc se refuser ces actions, dès qu’elles apportent à nos sens un trouble aussi voluptueux… Ah ! dit Laurentia… assassiner sur les grands chemins ! — Assurément : c’est une violence, toute violence agite les sens ; toute émotion dans le genre nerveux, dirigée par l’imagination, réveille essentiellement la volupté ; si donc je bande à aller assassiner un homme sur le grand chemin, cette action ayant le même principe que celle que me fait déboutonner ma culotte, ou trousser une jupe, doit être excusée comme elle, et je la commettrai dès-lors avec la même indifférence, mais cependant avec plus de plaisir, parce qu’elle a quelque chose de plus irritant. Comment, dit ma compagne, jamais l’idée d’un Dieu n’arrêta tes écarts. Ah ! ne me parte pas de cette indigne chimère, je n’avais pas douze ans, qu’elle était déjà l’objet de ma dérision. Je ne concevrai jamais que des hommes sensés, puissent s’arrêter un moment à cette fable dégoûtante que le cœur abjure, que la raison désavoue, et qui ne peut trouver de partisans, que parmi des sots, des fripons ou des fourbes. S’il était vrai qu’il y eût un Dieu, maître et créateur de l’univers, ce