de vous, mais nous nous rencontrons ici presque
tous les matins ; ce que vous avez pu voir de
moi doit vous avoir convaincu, je me flatte, que
je ne suis pas une fille à aventure ; je vous
demande avec instance de me donner la main
pour me ramener chez moi et de me délivrer de
ces bandits. M. de …, vous me permettrez de
taire son nom, trop de raisons m’y engagent,
accourt aussitôt, il écarte les polissons qui
m’entourent, les convainc de leur erreur par
l’air de politesse et de respect dont il m’aborde,
prend mon bras, et me sort aussitôt du jardin.
Mademoiselle, me dit-il un peu avant que d’être
à notre porte, je crois prudent de vous quitter
ici ; si je vous conduis jusque chez vous, il
faudra en dire le sujet ; peut-être naîtra-t-il de
là une défense de vous promener seule davantage ;
cachez donc ce qui vient d’arriver, et continuez
de venir comme vous faites dans cette
même allée, puisque ça vous amuse et que vos
parents vous le permettent. Je ne manquerai
pas un seul jour de m’y rendre et vous m’y
trouverez toujours prêt à perdre la vie, s’il le
faut, pour m’opposer à ce qu’on trouble votre
tranquillité. Une telle précaution, une offre si
obligeante, tout cela me fit jeter les yeux sur
ce jeune homme, avec un peu plus d’intérêt
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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX