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LE PRÉSIDENT MYSTIFIÉ
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plus de motif, qu’il ne le perdrait point de vue. J’ai obtenu avec beaucoup de peine, lui dit-il, un château-fort situé à cinq ou six lieues d’ici, vous y serez sous les ordres d’un de mes anciens amis qui vous traitera comme si c’était moi-même, je lui écris par vos gardes pour vous recommander encore plus vivement, soyez donc en pleine paix.

Le président pleura comme un enfant, rien n’est amer comme les remords du crime qui voit retomber sur sa tête tous les fléaux dont il s’est lui-même servi… mais il n’en fallut pas moins s’arracher, il demanda avec instance la permission d’embrasser sa femme. — Votre femme, lui dit brusquement la marquise, elle ne l’est pas encore heureusement, et c’est dans nos calamités le seul adoucissement que nous connaissions. — Soit, dit le président, j’aurai le courage de soutenir encore cette plaie-ci, et il monta dans la voiture des exempts.

Le château où l’on conduisait ce malheureux, était celui d’une terre de la dot de Mme d’Olincourt, où tout était préparé pour le recevoir ; un capitaine du régiment d’Olincourt, homme vert et rébarbatif, devait y jouer le rôle de gouverneur. Il reçut Fontanis, congédia les gardes, et dit durement à son prisonnier en l’envoyant dans