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, Si vous aviez déjà vu ce madrigal, Madame, il ne vous déplaira pas de le revoir ; si vous ne le saviez pas, vous serez bien aise de l’apprendre, et de voir aussi un rondeau que je viens d’envoyer à ma sœur de Toulongeon, avec qui vous savez que je bats toujours le fort sur la galanterie :

RONDEAU.[1]

C’est trop longtemps tarder à vous écrire,

Aimable Iris; il faut enfin vous dire

Que mon esprit est tout en désarroi

Absent de vous, et qu’encor je prévoi

Qu’à l’avenir je n’y pourrai suffire.

Deux mois d’absence à quiconque soupire,

C’est plus d’un an de peine et de martyre;

C’en est bien plus, c’est un siècle pour moi,

C’est trop longtemps.

Le temps est cher à tout ce qui respire;

Mais le barbon sous l’amoureux, empire

Est plus pressé d’en faire un bon emploi :

Toujours vous voir, je m’en fais une loi;

Être un moment sans voir ce qu’on désire,

C’est trop longtemps.

Un peu de vers, un peu de prose, un peu de livres, un peu de conversation, un peu de vieux titres voilà comme se passe la vie, qui est aussi longue ainsi et plus tranquille qu’en gouvernant les États.

Adieu, ma chère cousine j’aime fort à vous écrire, mais je voudrois pourtant bien vous revoir votre nièce en a, dit-elle, pour le moins autant d’impatience que moi.

    que l’appel de Monsieur le Prince ne produisit que la gasconnade qu’on vient de lire. (Note de l’édition de 1818.)

  1. 10. Nous appliquerions volontiers à l’envoi de ce rondeau la remarque que nous avons faite un peu plus haut, p. 52, note 3.