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saurois souffrir. Je voudrois passer le reste de ma vie à la campagne, dans un voisinage de mes bons amis, comme le vôtre, ma chère cousine ; je me moquerois encore plus que je ne fais des offices de la couronne et de l’ordre du Saint-Esprit ; mais cela ne se pouvant pas, j’ai recours aux lettres, qui me tiennent lieu de conversations.

Ce que vous me mandez des huguenots de Dauphiné me fait souvenir des miquelets[1] de Catalogne ; ils m’ont Fait enrager vingt fois en une campagne :je les voyois à cent pas de moi, et tout d’un coup je ne les voyois plus ; ils se sauvoient par des rochers inaccessibles qu’aux chèvres[2] et à eux. Nous les tirions en volant, mais sans effet ; et ils étoient plus heureux que nous, car ils nous tuoient toujours des hommes et des chevaux.

Vous faites bien, Madame, de prendre la commodité de la duchesse de Chaulnes pour aller en Bretagne ; on ne peut faire un voyage plus agréablement que vous ferez celui-là. Notre arrière-ban de Bourgogne ne sera pas si magnifique que celui de Bretagne. M. de Toulongeon ne mènera pas celui de son bailliage : sa santé ne le lui sauroit permettre. Je ne sais, Madame, si M. de Pompone ne vous a point conté qu’en 1674 les arrière-bans ayant été commandés, j’écrivis au Roi que je ne çroyois pas que Sa Majesté voulùt que je marchasse avec


  »

  1. 4. Voyez les Mémoires de Bussy, tome I, p. 366, 367 et 370. «  » C’est, dit-il à la p. 367, une espèce de bandits qui, sans aveu de personne, font la guerre pour un parti qu’ils affectionnent, et une autre fois contre. » --Le mot Miguelete, Miquelete, s’employait proprement en espagnol pour désigner les anciens bandits qui se réfugiaient dans les Pyrénées, principalement sur les frontières de l’Aragon et de la Catalogne.
  2. 5. Tel est le texte du manuscrit. Les éditions antérieures, même celle de 1697, donnent « inaccessibles à tout autre qu’aux chèvres, etc.