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heureuse sou étoile n’est pas si brillante que celle de Mlle de Coislin[1] qui semble présentement toute tournée du côté de M. d’Enrichemont les articles furent signés lundi, mais avec protestation que si on ne réformoit un article dans le contrat, le mariage étoit rompu. On ne voulut pas s’en retourner sans signer, de peur de faire rire le monde on prit ce milieu, qui ne laisse pas d’être plaisant le jour que toute une famille est assemblée, et qu’ordinairement tout est d’accord mais M. de Coislin a de grandes ressources pour les difficultés cependant c’est cette fois que le courrier de Rome est parti [2]

La lettre de M. de Grignan m’a fait frémir, moi, ma chère enfant, qui ne puis pas souffrir la vue ni l’imagination d’un précipice ; quelle horreur de passer par-dessus, et d’être toujours à deux doigts de la mort affreuse ! Je ne comprends pas comme M. de Grignan peut aller dans un pays dont les ours ne peuvent souffrir la demeure. Vraiment, Mlles de laCharce [3],sont agréablement établies : voilà un joli château. Ce qui me fâche, c’est que je crains que ces démons [4] qui disparoissent dès qu’ils ont peur et qu’ils voient M.d Grignae, ne reparoissent avec la même facilité dès qu’il n’y sera plus, et ce seroit toujours à recommencer[5]. En vérité, ma fille, le Roi est bien servi : on ne compte guère ni son bien ni sa vie, quand il est

  1. 3. Voyez plus haut, p. 365, note 14., et p. 489,
  2. Le courrier qui allait solliciter les dispenses nécessaires. " Le duc de Sully et le duc de Coislin, pères de M. d’Enrichemont et de Mlle de Coislin, étoient fils des deux filles du chancelier Seguier. » (Note de Saint-Simon à Dangeau tome II, p. 133.) Voyez au tome suivant, la lettre du 6 avril 1689, vers la fin.
  3. 5. Voyez tome IV, p. 124, note 12, et au dernier volume, sous l’année 1692, la note du fragment de lettre dont nous avons parlé tome V, p. 156, dans la note.
  4. 6. Les huguenots.
  5. 7. " Aussitôt qu'il n'y sera plus ; ce serait donc toujours à recommencer." ( Edition de 1754)