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point à Vincennes, comme on disoit. Ce sera justement aujourd’hui la véritable fête des rois, bien agréable pour celui qui protège et qui sert de refuge, et bien triste pour celui qui a besoin d’un asile. Voilà de grands objets et de grands sujets de méditation et de conversation. Les politiques ont beaucoup à dire. On ne doute pas que le prince d’Orange n’ait bien voulu laisser échapper le roi, pour se trouver sans crime maître de l’Angleterre et le roi, de son côté, a eu raison de quitter la partie plutôt que de hasarder sa vie avec un parlement qui a fait mourir le feu roi son père, quoiqu’il fùt de leur religion. Voilà de si grands événements, qu’il n’est pas aisé d’en comprendre le dénouement, surtout quand on jette les yeux sur l’état et sur les dispositions de toute l’Europe. Cette même Providence qui règle tout, démêlera tout ; nous sommes ici les spectateurs très-aveugles et très-ignorants.

Le second tome de M. de Lauzun est fort beau et digne du premier. Il a eu l’honneur d’être enfermé une heure avec le Roi. Mademoiselle en est très-fâchée, et demande qu’au moins il ne se trouve point où elle sera; je ne sais si on aura bien de l’attention à sa colère. Il vaudroit bien mieux que tout d’un coup elle le revît à son ordinaire, que de le revoir, comme elle fera assurément, après avoir fait bien des façons.[1]

Vous ne doutez pas, mon cousin, que nous n’eussions maintenant de grands sujets de nous entretenir ; mais il est impossible d’écrire.

Adieu je vous embrasse, et ma chère nièce ; je la plains d’être obligée de se faire saigner pour son mal d’yeux. Tenez, mon cher Corbinelli, prenez la plume.

    en effet le 6 à Saint-Germain, mais le roi, son mari, n’y arriva que le lendemain.7. Voyez plus loin, p. 391 et la note 11.

  1. 3 Voyez ci-dessus, p. 360, note 19