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Vous[1] me mandez ensuite le gain du procès de la belle Comtesse. Je lui en ai fait compliment, et je vous en ai fait reproches, de l’avoir appris à Monsieur d’Autun avant moi.

Vous me mandez que cela vraisemblablement vous va séparer : j’en ai peur, et je dis là-dessus que comme à quelque chose malheur est bon, à quelque chose aussi bonheur est mauvais, car c’est le gain du procès qui vous donnera ce chagrin. Il ne falloit pas aussi que Mme de Grignan le perdît, mais votre compte et le sien étoit qu’il ne fût jugé de dix ans.

La mort de la petite Réville [2] est un coup particulier de cette Providence qui prend à tâche de sauver notre ami. Une plus longue vie de cette fille pouvoit engager son oncle dans des haines et dans une si grande avidité de bien, que cela auroit pu nuire à son salut. Cette aventure me l’a fait juger un prédestiné. Mme de Coligny dit que quand on a dit jusques ici je faillis à mourir de peur, ç’a été une exagération hyperbolique; mais qu’aujourd’hui c’est une chose de fait. Elle vous rend mille grâces de l’honneur de votre embrassade, et pour elle et pour son fils. Je vous ai parlé dans ma dernière lettre si amplement d’Abbadie que je n’ai rien à y ajouter, sinon que je le relirai tous les trois mois du reste de ma vie.

A CORBINELLI.

Bien vous a pris, Monsieur, d’avoir fait provision dans Abbadie de soumission aux ordres de la Providence, pour soutenir la perte que vous avez faite de Mademoiselle votre nièce. Je suis de l’avis de ceux qui vous disent

  1. LETTRE 1055. 1. Ce paragraphe et le suivant avaient été omis dans l’édition de 1818 ; ils se trouvent dans la première (1697).
  2. 2, La nièce de Corbinelli.