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1677 bonne disposition ? Quand j’aurai autant de plaisir à vous regarder, que j’ai eu de douleur sensible ; quand je vous verrai comme vous devez être, étant jeune, et non pas usée, consumée, dépérie, échauffée[1], épuisée, desséchée ; enfin quand je n’aurai que les chagrins courants de la vie, sans en avoir un qui assomme, si je puis jamais avoir cette consolation, je pourrai me vanter d’avoir senti le bien et le mal en perfection. Cependant votre exemple coupe la gorge, à droite et à gauche : le duc de Sully dit à sa femme : « Vous êtes malade, venez à Sully : voyez Mme de Grignan, le repos de sa maison l’a rétablie, sans qu’elle ait fait aucun remède. » Mais la duchesse ne goûte point cette ordonnance, et préfère celle de Vesou, qui lui ordonne d’abord deux saignées, deux médecines, et vingt jours de bain : j’avoue que je ne comprends guère cette autre extrémité[2], dans le temps où nous sommes, et pour un lieu comme Sully, jusqu’à la Toussaint. Je la vis hier : elle vous fait mille amitiés.

Je suis fâchée que vous m’ayez écrit tant de lignes pour me persuader que vous ne devez point faire de remèdes, puisque vous vous portez bien. Je suis de votre avis : peut-être que le lait vous est contraire[3] ; suivez votre expérience : le repos et le temps vous sont favorables ; laissez-leur l’honneur tout entier, j’y consens. Plût à Dieu que vous me dispensassiez par la même raison de retourner à Vichy ! mais je ne trouve pas que vous le veuilliez[4] : la précaution vous paroît une nécessité ; et comme on ne voit pas bien si elle est inutile ou non,

  1. 5. Ce mot n’est pas dans l’édition de 1734. Deux lignes plus bas, celle de 1754 n’a pas ceux-ci : « sans en avoir un qui assomme. »
  2. 6. L’alinéa finit au mot extrémité dans le texte de 1734.
  3. 7. Ces deux premiers membres de phrase ne sont pas dans l’édition de 1734.
  4. 8. Laissez-leur l’honneur, j’y consens, l’honneur tout entier de votre gué-