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1672

278. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN À MADAME DE SÉVIGNÉ ET À CORBINELLI.

Quatre jours après que j’eus reçu cette lettre (du 16 mai, voyez p. 67), je répondis celle-ci à Mme de Sévigné.
À Chaseu, ce 23e mai 1672[1].
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à madame de sévigné.

Je vois bien, ma belle cousine, que vous avez cela de commun avec les honnêtes gens, qu’il vous faut louer pour avoir du plaisir de vous. Parce que je vous assurai, il y a quelque temps, de l’agrément que j’avois trouvé dans une de vos lettres, vous venez d’en remplir toute celle-ci.

Je sais bien qu’il faut avoir de l’esprit pour bien écrire, qu’il faut être en bonne humeur, et que les matières soient heureuses ; mais il faut surtout que l’on croie que les agréments qu’on aura ne seront pas perdus ; et sans cela, l’on se néglige.

En vérité, rien n’est plus beau ni plus joli que votre lettre ; car il y a bien des choses du meilleur sens du monde, écrites le plus agréablement. Je demeure d’accord avec vous que nous nous devons aimer. Personne ne sait si bien que moi ce que vous valez ; ni ce que je vaux, que vous. Nous nous aimons aussi, à ce qu’il me semble, et cela durera toujours, pourvu que nous n’ayons pas plus de confiance en autrui qu’en nous-mêmes. Pour moi, je vous réponds de résister aux tentations de vos ennemis plus qu’à celles du diable.

Nous ne savons aucunes nouvelles, parce que non-seu-

  1. Lettre 278. — 1. Cette lettre est datée du 25 dans l’édition de 1818 ; mais dans le manuscrit de Bussy elle l’est du 23, aussi bien que dans la première édition (1697).