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ponse, et nous eussions eu besoin de vous-même pour rendre cette conversation plus agréable.

Je vous remercie, ma bonne, de la peine que vous prenez de vous défendre si bien d’avoir jamais été oppressée de mon amitié[1]. Il n’était pas besoin d’une explication si obligeante ; je crois de votre tendresse pour moi tout ce que vous pouvez souhaiter que j’en pense : cette persuasion fait le bonheur et la félicité de ma vie. Vous expliquez très-bien cette volonté que je ne pouvois deviner, parce que vous ne vouliez rien : je devrois vous connoître ; et sur cet article je ferai encore mieux que je n’ai fait, parce qu’il n’y a qu’à s’entendre. Quand mon bonheur vous redonnera à moi, croyez, ma bonne, que vous serez encore plus contente de moi mille fois que vous ne l’êtes : plût à Dieu que nous fussions déjà à portée de voir le jour où nous pourrons nous embrasser !

Vous riez, ma bonne, de la pauvre amitié ; vous trouvez qu’on lui fait trop d’honneur de la prendre pour un empêchement à la dévotion : il ne lui appartient pas d’être un obstacle au salut ; on ne la considère jamais que par comparaison ; mais je crois qu’il suffit qu’elle remplisse tout le cœur pour être condamnée ; et quoi que ce puisse être qui nous occupe de cette sorte, c’est plus qu’il n’en faut pour ne pas être en état de communier[2].

Vous voyez que le syndic[3] m’avoit mise hors de com-

  1. 8. Il s’est introduit une faute bizarre dans l’édition de la Haye (1726). On a sauté amitié et réuni de mon en un seul mot, qu’on a fait précéder d’un article, ce qui a donné la fin de phrase que voici : « d’avoir jamais été oppressée du démon. » — Le paragraphe suivant se termine dans cette même édition de la Haye par une autre absurdité : « pour être en état de communier ; » la négation est omise.
  2. 9. Voyez la lettre du 5 juin précédent, p. 467.
  3. 10. Tel est le texte des éditions de 1726. Dans celles de Perrin : « l’affaire du syndic. » Cette affaire du syndic est l’élection d’un