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pas sans parler de son père et de ma fille : voilà deux chapitres qui nous tiennent à cœur. J’attends tous les jours mon fils ; il m’écrit des tendresses infinies ; il est parti plus tôt, et revient plus tard que les autres ; nous croyons que cela roule sur une amitié qu’il a à Sézanne ; mais, comme ce n’est pas pour épouser, je m’en mets l’esprit en repos.

Il est vrai que l’on a attaqué M. de Villars et ses gens en revenant d’Espagne : c’étoient les gens de l’ambassadeur[1], qui revenoit de France. Ce fut un assez ridicule combat ; les maîtres s’exposèrent, on tiroit de tous côtés ; il y a eu quelques valets de tués ; mais nous n’avons point ouï parler d’un abbé de Ruvigny. On n’a point fait de compliments à Mme de Villars ; elle a son mari, elle est contente. M. de Luxembourg est ici[2]. On parle fort de la paix, c’est-à-dire selon les desirs de la France, plus que sur la disposition des affaires ; cependant on la peut vouloir d’une telle sorte qu’elle se feroit.

Vous étiez un peu méchante quand vous m’avez écrit ; mais je vous le pardonne ; je sens tout ce que vous sentez, et j’en suis méchante aussi. Ces fagots habillés me font enrager comme vous ; il y a fagots et fagots ; j’aimerois mieux ceux de cent dix sous[3]. Il y a des endroits dans vos lettres qui valent trop d’argent.

  1. 11. L’ambassadeur d’Espagne, comte de Molina. — La Gazette, après avoir raconté le fait dont parle ici Mme de Sévigné, dans le numéro du 23 décembre 1673, le mentionne de nouveau dans celui du 20 janvier suivant. Elle dit que c’est au passage de la Bidassoa que le marquis de Villars fut attaqué, que « l’abbé de Ruvigny fut tué, et deux ou trois autres personnes. » Le marquis arriva à Saint-Germain le 12 janvier et fut accueilli très-favorablement du Roi.
  2. 12. Le duc de Luxembourg arriva à Saint-Germain le 23 janvier. « Sa Majesté lui fit tout le bon accueil possible, et tel qu’il le pouvoit attendre pour les grands services qu’il a rendus depuis deux campagnes si laborieuses. » (Gazette du 27 janvier.)
  3. 13. Voyez le Médecin malgré lui, acte Ier, scène dernière : « Je