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geoient agréablement[1]. Au nom de Dieu, ne vous moquez pas de mes précautions : ce n’est qu’avec de la sagesse et de la prévoyance qu’on voyage bien. Adieu, mon cher Comte ; je puis donc espérer de vous embrasser bientôt : quelle obligation ne vous ai-je point ? Si j’ai pour vous une véritable amitié, et une inclination naturelle, vous savez bien au moins que ce n’est pas d’aujourd’hui.


1674

372. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET DE CORBINELLI À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris, vendredi 19e janvier.
de madame de sévigné.

Je serois bien fâchée, ma fille, qu’aucun courrier fût noyé ; ils vous portent tous des lettres et des congés qu’il faut que vous receviez. Vous êtes admirable de vous souvenir de ce que j’ai dit de cette Durance. Pour moi, je n’oublie rien de tout ce qui a seulement rapport à vous : jugez donc si je me souviens de Nove[2] et de notre Espagnol, et de nos chartreux, et de nos chansons de Grignan, et de mille et mille autres choses ! Vous voudriez donc que je visse votre cœur sur mon sujet ; je suis persuadée que j’en serois contente ; vous n’êtes point une diseuse, vous êtes assez sincère ; et en un mot, sans étendre ce discours, que je rendrois asiatique[3], si je voulois,

  1. Lettre 371. — 1. Voyez la lettre du 10 octobre précédent.
  2. Lettre 372 (revue en grande partie sur une ancienne copie). — 1. Dans le canton de Château-Renard et l’arrondissement d’Arles.
  3. 2. Au livre XII, chap. x, de Quintilien, de la traduction de l’abbé de Pure (Paris, 1663, p. 395), le style asiatique est ainsi défini, par opposition au style attique : « Les anciens ont fait cette différence des Asiatiques et des Attiques, que ceux-ci sont serrés et pleins ; ceux-là