Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 3.djvu/288

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 282 —

1673


certains discours à faire valoir, qui ne sont pas inutiles en ce pays.

C’est une routine qu’ils ont tous prise de dire que je suis belle ; ils m’en importunent : je crois que c’est qu’ils ne savent de quoi m’entretenir. Hélas ! mes pauvres petits yeux sont abîmés ; j’ai la rage de ne dormir que jusqu’à cinq heures, et puis ils me viennent admirer. Notre d’Hacqueville ne vous écrit point ce soir ; voilà des nouvelles qu’il vous avoit écrites dès le matin. Il est bien content de notre voyage, quoique nous n’ayons rien fait ; c’est quelque chose d’être déterminé, et de savoir ce qu’on doit faire.

Monsieur le Prince et Monsieur le Duc sont revenus, ravis que votre imagination ne les cherche plus en Flandre. S’ils n’avoient point fait d’anciennes provisions de lauriers, ceux de cette année ne les mettroient point à couvert. Bonn est prise[1], c’en est fait. M. de Turenne a bien envie de revenir, et de mettre l’armée de mon fils[2] dans les quartiers d’hiver : tous les officiers disent amen.

  1. 9. « Trente mille Impériaux étaient partis de la Bohême sous le commandement de Montecuculi… leur intention était de se joindre au prince d’Orange, qui à cette époque échappait à Condé avec trente-cinq mille hommes… Turenne se rendit maître de tous les passages du Mein et offrit la bataille à Montecuculi ; mais celui-ci, ayant acheté le pont de Wurtzbourg à l’évêque de cette ville, passa le Mein et feignit de menacer l’Alsace, ce qui força Turenne à rétrograder sur Philipsbourg ; puis il marcha sur Coblentz, dont l’électeur de Trèves lui livra les ponts, et se joignit au prince d’Orange. Cette jonction équivalait pour la France à une grande défaite. Les alliés se portèrent aussitôt sur Bonn… Turenne, qui était accouru de Philipsbourg sur Trèves pour essayer de défendre la Moselle et d’empêcher la jonction, arriva trop tard (7 novembre) ; il ne put secourir Bonn, et recula sur la Sarre, pour couvrir la Lorraine. » (M. Lavallée, Histoire des Français, tome III, p. 261.)
  2. 10. Dans l’édition de 1734, Perrin a corrigé cette plaisanterie, et