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Vous écrivez extrêmement bien, personne n’écrit mieux : ne quittez jamais le naturel, votre tour s’y est formé, et cela compose un style parfait. J’ai fait vos compliments à M. de la Rochefoucauld et à Mme de la Fayette et à Langlade : tout cela vous estime, vous aime et vous sert en toute occasion. Pour d’Hacqueville, nous ne parlons que de vous. J’ai ri de votre folie sur la confiance ; je la comprends bien : mais quel hasard, et que cela est malheureux, qu’il se soit trouvé que tout ce que vous avez voulu savoir du Coadjuteur et lui de vous ait été précisément des choses dont vous n’étiez point les maîtres ! Vos chansons m’ont paru jolies ; j’en ai reconnu les styles.

Ah ! ma bonne, que je voudrois bien vous voir un peu, vous entendre, vous embrasser, vous voir passer, si c’est trop que le reste ! Eh bien, par exemple, voilà de ces pensées à quoi je ne résiste pas. Je sens qu’il m’ennuie de ne vous plus avoir : cette séparation me fait une douleur au cœur et à l’âme, que je sens comme un mal du corps. Je ne puis assez vous remercier de toutes les lettres que vous m’avez écrites sur le chemin : ces soins sont trop aimables, et font bien leur effet aussi ; rien n’est perdu avec moi. Vous m’avez écrit de partout ; j’ai admiré votre bonté ; cela ne se fait point sans beaucoup d’amitié ; sans cela on seroit plus aise de se reposer et de se coucher ; ce m’a été une consolation grande. L’impatience que j’ai d’en avoir encore et de Rouane et de


    de Valençay, neveu de Mme de Puisieux. Elle eut trois fils et quatre filles : deux mariées, une morte abbesse de Clérets en 1705, la dernière, Henriette, religieuse à la Visitation de Moulins. — Il résulte de la lettre du 17 mai 1676 que Mme de Grignan rencontra la marquise de Valençay priant avec ses filles près du tombeau de Montmorency. L’édition de la Haye et l’ancienne copie que nous suivons pour le texte de cette lettre ont Valence au lieu de Valençay. C’est la coutume de Mme de Sévigné d’écrire ces désinences par un e, et il n’est pas rare qu’elle omette l’accent.