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point à l’assemblée[1]. Du reste, il faut que je dise comme Voiture : personne n’est encore mort de votre absence, hormis moi. Ce n’est pas que le carnaval n’ait été d’une tristesse excessive, vous pouvez vous en faire honneur ; pour moi, j’ai cru que c’étoit à cause de vous ; mais ce n’est point assez pour une absence comme la vôtre. J’envoie pour cette fois cette lettre en Provence ; j’embrasse M. de Grignan, et je meurs d’envie de savoir de vos nouvelles. Dès que j’ai reçu une lettre, j’en voudrois tout à l’heure une autre, je ne respire que d’en recevoir.

Vous me dites des merveilles du tombeau de M. de Montmorency[2], et de la beauté de Mlles de Valençay[3].

  1. 6. On devine sans peine que ce grand homme est le Roi. Quant à la dame, c’est sans doute Mme de Montespan, voilée par une contrevérité. — « La cour, dit Mademoiselle, alla le premier jour de carême à Versailles. Il y avoit eu un bal en masque aux Tuileries, où Mme de Montespan et Mme de la Vallière n’avoient pas paru. Mme de la Vallière s’en alla dès six heures du matin à Chaillot, aux Filles de Sainte-Marie. Le Roi y envoya M. Colbert et M. de Lauzun. Nous allâmes à Versailles. Tout le chemin se passa en pleurs : le Roi, Mme de Montespan et moi. Je pleurois de compagnie ; les deux autres pleuroient Mme de la Vallière, qui les consola bientôt : elle revint. » (Mémoires, tome IV, p. 260.) M. Chéruel cite en note le passage suivant du Journal de d’Ormesson : « Le 11 février, Mme de la Vallière se retira à Chaillot… Le Roy lui envoya M. de Bellefonds, et ensuite M. Colbert, avec ordre de la mener à Versailles, où il alloit : ce qu’il fit, et la dame y alla, sur la parole que le Roy trouveroit bon qu’elle se retirât si elle persévéroit. »
  2. 7. Henri II, duc de Montmorency, maréchal de France, décapité à Toulouse le 30 octobre 1632, pour avoir pris part aux troubles excités par Gaston, duc d’Orléans. Marie-Félice des Ursins, sa veuve, se retira dans le monastère de la Visitation de Moulins pour y pleurer sa perte. Elle y érigea au duc un mausolée magnifique, se fit religieuse (1657), et mourut en 1666, supérieure de ce couvent, où était conservé le cœur de sainte Chantal.
  3. 8. Marie-Louise de Montmorency, fille aînée de François de Montmorency, comte de Bouteville, décapité en 1627, sœur du maréchal de Luxembourg et de la duchesse de Mecklenbourg (d’abord duchesse de Châtillon), avait épousé Dominique d’Estampes, marquis