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employé, qu’il vous avoit avertie de toutes les plaisanteries qu’elle avoit faites à votre première couche[1] ; que vous ne daignâtes pas l’écouter ; que depuis ce temps-là il n’a pas été chez vous. Il y a longtemps que cette créature-là parloit très-mal de vous ; mais il falloit que vous en fussiez persuadée par vos yeux. Et notre Coadjuteur[2], ne voulez-vous pas bien l’embrasser pour l’amour de moi ? N’est-il pas encore Seigneur Corbeau pour vous ? Je desire avec passion que vous soyez remise comme vous étiez. Hé, ma pauvre fille ! hé ! mon Dieu ! a-t-on bien du soin de vous ? Il ne faut jamais vous croire sur votre santé : voyez ce lit que vous ne vouliez point ; tout cela est comme Mme Robinet[3]. Adieu, ma chère enfant, l’unique passion de mon cœur, le plaisir et la douleur de ma vie. Aimez-moi toujours, c’est la seule chose qui peut me donner de la consolation.


133. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

1671

À Paris, mercredi 11e février.

Je n’en ai reçu que trois de ces aimables lettres qui me pénètrent le cœur ; il y en a une qui me manque. Sans que je les aime toutes, et que je n’aime point à perdre ce qui me vient de vous, je croirois n’avoir rien perdu ; je trouve qu’on ne peut rien souhaiter qui ne soit dans celles que j’ai reçues. Elles sont premièrement très-bien écrites ; et de plus si tendres et si naturelles qu’il est im-

  1. 20. La fausse couche que Mme de Grignan fit à Livry, en novembre 1669.
  2. 21. Voyez la note 4 de la lettre 115.
  3. 22. Voyez plus haut, p. 13 et 14, lettre 115.