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testament l’éducation de ses enfants[1] à Mme de Longueville. Je disois qu’il n’y avoit que le diable qui gagnoit à cette mort, et qui alloit reprendre de l’autorité dans l’esprit de ces deux petits princes ; mais afin qu’en nul lieu on ne s’en réjouisse, les voilà retombés en main sûre et chrétienne[2]. Monsieur le Prince est tuteur. Il y a vingt mille écus aux pauvres, autant aux domestiques. Elle veut être enterrée à sa paroisse, simplement, comme la moindre femme. Je ne sais si ce détail est à propos : tant y a, ma bonne, le voilà. Vous voulez et vous souffrez que mes lettres soient longues : voilà le hasard que vous courez. Je vis hier sur son lit cette sainte princesse : elle étoit défigurée par les martyres qu’on lui avoit fait souffrir pour tâcher de la faire revenir : on lui avoit rompu les dents, et brûlé la tête ; c’est-à-dire que si on ne mouroit point de l’apoplexie, on seroit à plaindre dans l’état où l’on met les pauvres patients. Il y a de belles réflexions sur cette mort, cruelle pour sa famille et ses amis, mais très-heureuse pour elle, qui ne l’a point sentie, et qui y étoit toujours préparée[3]. Brancas en est pénétré.

  1. 5. Louis-Armand de Bourbon, prince de Conti, né le 4 avril 1661, qui épousa Marie-Anne, fille légitimée de Louis XIV et de Mlle de la Vallière, et mourut sans enfants le 9 novembre 1685 ; et François-Louis, prince de la Roche-sur-Yon, puis prince de Conti, né le 30 avril 1664, qui épousa en 1688 Marie-Thérèse, sa cousine, fille de Henri-Jules de Bourbon, prince de Condé, et qui mourut le 22 février 1709.
  2. 6. Au lieu de cette phrase : « Je disois qu’il n’y avoit, etc., » les éditions de 1725 et de 1726 offrent une leçon qui peut, à certains égards, paraître préférable ; la voici : « Ainsi voilà le diable pris pour dupe, s’il croyoit reprendre ces deux petits princes : les voilà retournés en bonne main. »
  3. 7. La princesse de Conti fut inhumée à Saint-André des Arcs ; on lui érigea un mausolée, avec une épitaphe où on lisait ces mots : « Elle vendit toutes ses pierreries pour nourrir, durant la famine de 1662, les pauvres de Berry, de Champagne, de Picardie… se ré-