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que vous ne l’ayez plus. J’avois l’esprit en repos de mille choses, en songeant qu’elle en auroit soin. Mandez-moi un peu plus au long toute cette histoire.

Au reste, ma bonne, j’ai le cœur serré, et très-serré de ne point vous avoir ici. Je serois bien plus heureuse s’il y avoit quelqu’un que j’aimasse autant que vous, je serois consolée de votre absence ; mais je n’ai pas encore trouvé cette égalité, ni rien qui en approche. Mille choses imprévues me font souvenir de vous par-dessus le souvenir ordinaire, et me mettent en déroute. Je suis en peine de savoir où vous irez après votre Assemblée. Aix et Arles sont empestés de la petite vérole ; Grignan est bien froid ; Salon[1] est bien seul. Venez dans ma chambre, ma chère enfant, vous y serez très-bien reçue.

Adieu, vous en voilà quitte pour cette fois : ce ne sera point ici un second tome, je ne sais plus rien. Si vous vouliez me faire des questions, on vous répondroit. J’ai été cette nuit aux Minimes[2] ; je m’en vais en Bourdaloue. On dit qu’il s’est mis à dépeindre les gens[3], et que l’autre jour il fit trois points de la retraite de Tréville[4] ; il n’y

  1. 4. Chef-lieu de canton des Bouches-du-Rhône, sur le canal de Crapone.
  2. 5. L’église des Minimes était près de la place Royale. — « La messe des Minimes, dit Walckenaer (tome IV, p. 126), était celle de la noblesse et du grand monde. » D’Ormesson nous apprend que Mme de Sévigné, quelque temps avant son mariage, avait quêté dans cette église, où était déposé le cœur de son père, le baron de Chantal : le 5 avril 1644, jour où l’on fêtait saint François de Paule, « la Reine y vint à vêpres ; Monsieur l’évêque d’Uzès y prêcha. La musique du Roi y fut excellente. Mlle de Chantal quêta. » Voyez la Notice, p. 13 et 317.
  3. 6.

    Nouveau prédicateur, aujourd’hui, je l’avoue,
    Écolier ou plutôt singe de Bourdaloue,
    Je me plais à remplir mes sermons de portraits.

    (Boileau, Satire X, v. 345-347)
  4. 7. Le comte de Tréville (voyez la note 9 de la lettre 144) avait été