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une perfection un peu au-dessus de l’humanité, que l’indifférence qu’il veut de nous pour l’estime ou l’improbation du monde : je suis moins capable que personne de la comprendre ; mais quoique dans l’exécution on se trouve foible, c’est pourtant un plaisir que de méditer avec lui, et de faire réflexion sur la vanité de la joie ou de la tristesse que nous recevons d’une telle fumée ; et à force de trouver ses raisonnements vrais, il ne seroit pas impossible qu’on s’en pût servir dans certaines occasions. En un mot, c’est toujours un trésor, quoi que nous en puissions faire, d’avoir un si bon miroir des foiblesses de notre cœur. M. d’Andilly est aussi content que nous de ce beau livre.

M. de Coulanges vous a gagné votre argent ; mais vous avez bien ri en récompense : rien ne peut égaler ce qu’il a écrit à sa femme. Je ne crois pas que je le quitte cet hiver, tant je serai ravie de parler de vous avec un homme qui vous a vue et admirée de si près. Pour Adhémar, puisqu’il est méchant, je le chasserai ; il est vrai qu’il a un régiment, et qu’il entrera par force. On me mande que ce régiment est une distinction agréable ; mais n’est-ce point aussi une ruine ? Ce que je trouve de bon, c’est que le Roi se soit souvenu d’Adhémar, en absence[1]. Plût à Dieu qu’il se souvînt aussi de son aîné, puisqu’il va bien jusqu’en Suède chercher de fidèles serviteurs ! On dit que M. de Pompone fait sa charge comme s’il n’avoit jamais fait autre chose ; personne ne s’y est trompé.

J’aime le Coadjuteur de m’aimer encore. Adhémar, Chevalier, approchez-vous, que je vous embrasse, je suis attachée à ces Grignans. Il s’en faut bien que le livre

  1. 7. Dans l’édition de 1734 on lit : « en son absence ; » et à la ligne précédente chevalier de Grignan, au lieu d’Adhémar. Voyez la note 1 de la lettre 214.