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Grignan l’eût mise en ce temps, pour vous ôter tout l’agrément de votre séjour de campagne, et tout le plaisir de votre bonne compagnie. Vous y avez perdu aussi le pauvre Coulanges, qui m’écrit de Lyon tous ses déplaisirs, et qu’il est triste et confus, mangeant tristement son avoine, et ne songeant plus qu’à s’en retourner à Paris, c’est-à-dire à Autry[1], d’où il ne seroit pas sorti sans l’espérance de vous voir. Toute sa consolation, c’est de parler de vous avec ce chamarier de Rochebonne qui ne se peut taire de vos perfections. Si je n’avois point trouvé ridicule de vous envoyer toutes mes lettres, je vous aurois envoyé celle-là avec celle du comte des Chapelles ; mais voilà sa réponse qui suffira, avec deux autres lettres que je veux que vous ayez, celle de M. le Camus et celle de M. d’Harouys. Je pense que, pour vous donner le temps de lire tout ce que je vous envoie, la civilité m’obligeroit à finir ici ma lettre ; mais je veux savoir auparavant si vous n’avez point ri de la rêverie naturelle que je fis à Vitré, en priant ce gentilhomme de basse Bretagne de nous faire vitement dîner. Je crus que cela vous feroit souvenir de cet homme à la Merci[2], que je voulois qui raccommodât mes manches, et qui étoit le clerc d’un secrétaire du Roi. Mais ce que vous me dites du soleil et de la lune, de M. de Chaulnes et de M. de Lavardin, est très-bien dit, et que pour vous, vous êtes toujours sur l’horizon. Cela est vrai, ma fille, vous ne vous reposez jamais, vous êtes toujours dans le mouvement, et je tremble quand je pense à votre état et à votre courage, qui assurément passe de beaucoup vos forces. Je conclus comme vous que quand vous voudrez vous reposer, il ne sera plus

  1. Lettre 208. — 1. Voyez la note 11 de la lettre 166.
  2. 2. À l’église des pères de la Merci, rue du Chaume. Elle a été abattue depuis la Révolution ; il en existe encore quelques ruines.